L’e-sport fait l’objet d’un développement fulgurant : de nombreuses compétitions, nationales et internationales, ne cessent d’être créées attirant, dès lors, l’attention d’entreprises souhaitant promouvoir leur activité en s’associant à cette pratique. L’e-sport, pour « electronic sport », à savoir sport électronique, désigne la pratique de jeux vidéo confrontant au moins deux joueurs sur différents supports (Internet, local ou LAN).

Entrer dans le jeu

Pour les joueurs e-sport, les e-sportifs ou e-joueurs, c’est un moyen de se procurer d’une part, un revenu régulier et, d’autre part, le matériel nécessaire à l’exercice quotidien de leur activité comprenant, notamment, une grande part d’entraînement. Si une réglementation est progressivement adoptée, l’e-sport reste confronté à plusieurs problématiques et notamment à celle du statut juridique de l’e-joueur. Il peut être un travailleur indépendant ou un salarié.

Le statut de travailleur indépendant

Avant la promulgation de la loi pour une République numérique, en date du 7 octobre 2016, de nombreux joueurs ont opté pour le statut de travailleur indépendant qui recoupe deux possibilités :
– le statut d’auto-entrepreneur ;
– la Société par Actions Simplifiée (SAS).

  • Le statut d’auto-entrepreneur

Le statut d’auto-entrepreneur dispose d’avantages :
– de la simplicité de la déclaration (un simple formulaire à remplir) ;
– de la tenue d’une comptabilité allégée ;
– du régime social avantageux (règlement simplifié des cotisations et contributions sociales etc.) ;
– des avantages fiscaux (absence de TVA, exonérations fiscales, option pour le prélèvement libératoire etc.)

Il dispose, toutefois, également d’inconvénients :
– l’affiliation obligatoire au Régime Social des Indépendants (RSI) ;
– une responsabilité illimitée qui fait ici figure de point d’achoppement pour des jeunes joueurs ne disposant pas encore de patrimoine important.

A partir d’un chiffre d’affaires annuel encaissé de 33.100 euros, l’auto-entrepreneur bascule automatiquement dans un régime d’entreprise individuelle : la SAS.

  • La SAS

A titre liminaire, il convient de préciser que, s’agissant, en l’espèce, de joueurs exerçant seuls leur activité, la société prendrait la forme d’une Société par Actions Simplifiée à associé unique (SASU).

La SAS présente de nombreux avantages : une grande liberté contractuelle, l’option, dans certains cas, entre l’impôt sur les sociétés ou l’imposition des bénéfices à l’impôt sur le revenu, l’absence de cotisations sociales sur les dividendes perçues etc…Elle présente aussi certains inconvénients tels que la difficulté de rédaction des statuts, du fait notamment de la grande liberté contractuelle, ou encore l’impossibilité de bénéficier du régime des travailleurs non salariés, régime caractérisé par un taux de charges sociales beaucoup moins important que pour un dirigeant affilié au régime général.

En conséquence, bien que présentant certains avantages, tant le statut d’auto-entrepreneur que la création d’une SASU ne paraissent correspondre aux besoins juridiques des e-joueurs de par, notamment, la lourdeur administrative subséquente.

Le statut de salarié

L’e-joueur peut envisager le salariat. Toutefois, il en existe différents types. Il convient, tout d’abord, d’écarter certains contrats avant de s’intéresser au contrat qui semblerait le plus approprié : le CDD spécifique.

  • Les contrats à vraisemblablement écarter

Plusieurs contrats doivent vraisemblablement être écartés :
– le statut d’intermittent du spectacle ;
– le travail saisonnier ;
– le CDD ;
– le CDI

S’agissant du statut d’intermittent du spectacle, il doit être écarté dans la mesure où les e-joueurs n’étant pas réellement intermittents, car employés en continu au cours de l’année, cela créerait un risque de requalification en CDI. Le travail saisonnier doit également être écarté eu égard au caractère continu de la relation commerciale entre le joueur et l’équipe.

Le recours aux contrats à durée déterminée (CDD) de droit commun semble également inopportun car les conditions de recours, tels que l’accroissement temporaire de l’activité ou encore le remplacement d’un salarié absent, ne sont pas remplies. Les CDD d’usage dont les cas de recours, tel que le sport professionnel, sont prévus à l’article D. 1242-1 du code du travail, semblent également inapplicables dans la mesure où d’une part, l’e-sport n’est pas reconnu comme un sport et ne peut donc être compris dans les cas de recours de l’article D. 1242-1 du code du travail et, d’autre part, cela implique une soumission des équipes à la Convention collective nationale du sport (CCNS).

Enfin, le contrat à durée indéterminée (CDI) doit également être rejeté au regard, notamment :
– de l’inadéquation des règles de démission et de licenciement de droit commun avec la pratique internationale de rachat de joueurs ;
– de l’aléa sportif ;
– des courtes carrières des e-joueurs, de dix à quinze ans.

Si ces contrats n’apparaissent pas adaptés à l’e-sport, cela ne semble pas être le cas du CDD spécifique.

  • Le CDD spécifique

Les articles L. 222-2 à L. 222-6 du code du sport prévoient un CDD spécifique, applicable pour le sportif et l’entraîneur professionnels : d’une durée d’un à cinq ans, renouvelable autant que nécessaire et doté d’un bon niveau de sécurité juridique.

En considération des propositions d’un rapport intermédiaire, établi par deux sénateurs, Rudy SALLES et Jérôme DURAIN, la loi pour une République numérique a rendu ce CDD spécifique obligatoire en présence :
– d’e-joueurs professionnels salariés ;
– employés par une association ou une société bénéficiant d’un agrément.

Ce CDD est spécifique en ce qu’il prévoit :
– une durée ne pouvant, d’une part, être inférieure à la durée d’une saison de jeu vidéo compétitif de 12 mois, sauf exceptions (article 9 du décret n°2017-872 du 9 mai 2017), et d’autre part, excéder une durée de 5 ans sauf renouvellement ;
– des mentions obligatoires ainsi que des mentions interdites (ex : clauses de rupture unilatérale pure et simple du CDD) ;
– des modalités spécifiques d’autorisation de participation d’un mineur ;
– une requalification du CDD en CDI en cas de méconnaissances des règles précitées.

En conséquence, en dépit de ses avantages, le CDD spécifique présente plusieurs inconvénients :
– il implique une relation de travail qui implique de nombreuses conséquences (charges sociales etc.)
– la sollicitation d’un agrément au ministre chargé du numérique, à renouveler tous les 3 ans ;
– le texte de loi ne semble pas prévoir d’obligation de conclure un tel CDD pour les joueurs non-professionnels et/ou non salariés qui concluent un contrat avec une association ou une société ne bénéficiant pas de l’agrément.

Ce texte est publié sous la responsabilité de son auteur. Son contenu n’engage en aucun cas la rédaction des Echos Solutions.

Source: LesEchos.fr

CategoryJuridique
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